
L’exposition Unique en son genre, présentée au Musée de la civilisation de Québec, a débuté jeudi 18 mai dernier et elle se poursuivra jusqu’au 14 avril 2024. Mercredi 17 mai, les représentants des médias étaient notamment conviés à prendre part à la conférence de presse de cette pertinente exposition. Et, DL Vision Mode y était.

La question du genre :
L’identité d’une personne n’a jamais été aussi tendance qu’en ce moment. Celle-ci engendre nécessairement des transformations sociales, culturelles et des remises en question fondamentales qui ont un impact direct sur la société dans laquelle nous vivons. Et, le mieux vivre-ensemble fait partie de cette réflexion.

Stéphane Laroche, président-directeur général du Musée de la civilisation s’exprime en ce sens :
« Nous disons souvent que le Musée de la civilisation est la maison du monde. Un musée de société qui en fait autant partie qu’il en est le reflet. Unique en son genre est une main tendue, une initiative pour un dialogue bienveillant, nourri d’une meilleure compréhension des réalités et des vécus des personnes qui nous entourent. Qui que nous soyons, nous avons en commun cette part d’humanité nécessaire à la construction d’un monde ou chaque personne a sa place. »

Également, Marie-Philippe Phillie Drouin poursuit en ces mots :
« Rares sont les espèces ou la diversité de genre est traitée avec nuance et sensibilité. C’est pour moi une fierté d’avoir collaboré avec le Musée de la civilisation pour créer une exposition accessible, éducative et trans affirmative qui célèbre la créativité des communautés trans binaires et non-binaires. »
Partant de la prémisse que chaque personne a une identité de genre qui lui est propre et qu’elle est en relation avec des gens de différentes identités de genre, l’exposition Unique en son genre prend tout son sens et propose des œuvres ainsi qu’une série de contenus éducatifs qui permettront d’éclairer et favoriser une meilleure compréhension de l’autre et des dynamiques qui en résultent.
Une exposition nécessaire affirme Barbada de Barbade, de son véritable nom, Sébastien Potvin artiste drag, afin de favoriser la discussion et le mieux vivre ensemble.

Celle-ci est divisée en sept intéressants thèmes qui sont : le genre, en bleu et rose, le genre par la lentille de la biologie, des identités de genre, des sociétés et des époques, entre norme et marginalité, il y a des personnes, violences, luttes et droits trans, voir la beauté et la résilience et le vivre ensemble.
En tant que réalité sociale et culturelle, DL Vision Mode s’est principalement intéressée au phénomène mode lié à cette pluralité d’identité de genre.

Le genre, en bleu et rose
Cette notion de genre, présentée lors de l’exposition, se veut une prise de conscience collective. Partant du principe que tous les êtres humains ont un sexe, une identité de genre et une expression qui lui est propre, dans notre vie de tous les jours, le concept de binarité, l’identité homme, femme, permet une prise de conscience de la dualité et de l’exclusivité des univers féminin et masculin.

Alors se pose la question qu’est-ce que l’identité des genres et à quoi peut bien t-elle servir ? Les deux images présentées posent une réflexion sur les constructions sociales et les normes établies. Sont-elles représentatives de la pluralité des genres ?

L’expression de genre :
Cette notion désigne un ensemble de caractéristiques genrées que démontre une personne. Par exemple, son apparence extérieure, ses comportements sociaux, sa façon de se vêtir, les accessoires qu’elle porte, sa façon de se coiffer, la pilosité de son corps, sa démarche, le maquillage qu’elle porte, sa posture physique, sa voix et sa façon de s’exprimer.
Cette combinaison de caractéristiques fondamentales est alors considérée comme féminine ou masculine et elles dépendent des normes sociales établies. Si cette expression de genre n’est pas féminine ou bien masculine, on dira alors qu’elle est androgyne. Plusieurs artistes au fil du temps ont inspiré cette image, l’on n’a qu’à penser notamment à Annie Lennox ou bien a David Bowie.

Des identités de genre, de sociétés et d’époques
D’un point de vue anthropologique, les catégories sociales genrées varie considérablement en fonction d’une société à l’autre. La façon d’exprimer son identité existe depuis fort longtemps.
Par exemple, normalement associée à la garde-robe féminine, la robe est portée par les garçons à une certaine époque. À partir du 19e siècle jusqu’à la première moitié du 20e siècle, les garçons de familles bourgeoises portent la robe s’incluant ainsi dès le bas âge dans l’univers domestique féminin.
Autre exemple, la société inuite traditionnelle inclue un troisième genre dans ses rangs nommé sipiniq. Ces individus son dotés de deux esprits spirituels, un esprit homme et un esprit femme.

Traditionnellement, la croyance culturelle veut que ce phénomène qui survient à la naissance alors que le sexe de l’enfant se transforme curieusement sous les yeux de sa mère. Cet enfant est par la suite mis en relation sociale avec son nouveau genre jusqu’à la puberté.
La plupart du temps, ces enfants sont à la naissance des filles qui sont habitées par un esprit masculin. Elles sont ainsi considérablement respectées par leur communauté, elles sont très spirituelles et deviennent souvent des chamanes.
Entre norme et marginalité, il y a des personnes
Cette thématique de l’exposition s’intéresse ici à la notion de l’hétérocisnormativité. À savoir, comment certains type de corps, certaines identités, certains rôles et caractéristiques sociales sont soit normalisés ou soit marginalisés dans nos sociétés actuelles.
Par de nombreux témoignages, la compréhension sociale de ce qu’est l’identité politique queer, la diversité des expressions de genre, les différents types de transition et l’importance qu’elle représente pour les personnes trans se précise.

Au début du 20e siècle, le contexte social et politique de l’époque telle que l’arrivée de la Première Guerre mondiale fait en sorte que les femmes aient de nouveaux besoins en matière d’habillement. Les vêtements se veulent désormais plus pratiques et les styles créés sont alors puisés de la garde-robe masculine.
Le travail de création de Gabrielle Chanel en est un bon exemple s’inspirant ainsi du vestiaire masculin pour proposer le cardigan féminin, la marinière ou bien le maillot de garçon-d’écurie fabriqué en jersey version féminine.

Violences, luttes et droits des trans
Être marginalisé signifie socialement être victime d’intimidations et de violence. De façon historique, cette section de l’exposition démontre comment les violences vécues ont mené à de grandes luttes sociales en vue de changements législatifs et sociaux importants pour les personnes de la communauté LGBT+ et en particulier les personnes trans. On n’a qu’à penser à la modification de l’acte de naissance ou bien le droit au mariage des personnes de même sexe.

Cette veste en denim appartenant à Marie-Philippe Phillie Drouin où il est inscrit Queer Power symbolise l’autodérmination et la libération. Ce terme queer d’origine anglo-saxonne réfère à toute idée, pratique, personne ou identité qui va l’encontre des normes établissant le modèle social cishétéronormatif.


Voir la beauté et la résilience
Admirer la beauté, la résilience et la diversité des personnes trans, c’est aller au-delà de la violence et des luttes discriminatoires de ces individus afin de poser un regard neuf, ouvert et bienveillant. Sous forme d’expression artistique arborant une sensibilité particulière, les artistes queer savent nous émouvoir par l’humanité et la beauté qu’ils dégagent.

Pensons notamment à Jean Guilda, mieux connu sous le nom de Guilda, personnage féminin interprété par Jean Guilda de Mortellardo. Personne flamboyante qui a marqué la scène des théâtres de variétés de Montréal, Québec et de partout en région.

Parisien d’origine, l’artiste transformiste débarque à Montréal en 1955. C’est alors l’âge d’or des cabarets de la métropole. Jean Guilda se fait dès lors remarquer et est un des pionniers dans l’expression artistique de la diversité de genre. Son personnage coloré remporte à cette époque un vif succès.

Le costume de scène de drag king Rock Brière a été porté en 2022 lors du spectacle MajestiX dans le cadre du festival Fierté Montréal sur l’Esplanade du Parc Olympique. Rock Brière interprète ce personnage en posant un regard caricatural concernant les stéréotypes masculins afin d’explorer la question de l’identité de genre.

Lors de l’exposition, le visiteur pourra également découvrir le Vivarium. Espace d’observation des limites personnelles de chacun, cherchant ainsi à les reconnaître afin de mieux les respecter. Ce vivarium est en quelque sorte un laboratoire de rencontres et d’art vivant.

Le vivre ensemble
Cette dernière section de l’exposition traite de l’importance du respect de l’autre et du mieux vivre-ensemble.
Alors se pose des questions telles que : quels sont les principes de base afin de promouvoir l’inclusion des personnes trans socialement ? Quelques pistes de solutions et outils sont proposées afin de répondre à cette question et également afin de pousser plus loin la compréhension des réalités que vivent les personnes trans. Des ressources communautaires sont également proposées afin de leur venir en aide.


Bref, une exposition nécessaire qui émeut et qui fait réfléchir sur une réalité qui est bien souvent encore, de nos jours, taboue, cachée et collectivement qui est également la nôtre. Exposition définitivement à voir du 18 mai 2023 au 14 avril 2024.

Photographies, travail personnel et François Berthiaume, 17 mai 2023, Musée de la civilisation de Québec.